Interview du chanteur français Francis Cabrel par Thierry Savary.
Enregistrée à Paris en juin 1994, à l'occasion de la sortie de son album "Samedi soir sur la Terre" en 1994.
Francis Cabrel explique qu'enfant il voulait être guitariste dans un groupe de rock.
Il pense que chacun à des aptitudes dès l'enfance, et il faut les faire fructifier. Lui était plutôt axé dans la chose artistique. Ses proches ne l'ont pas particulièrement encouragé, il vient d'un milieu ouvrier modeste. Il a pu commencer à gagner un peu sa vie dès 15 ans en chantant. Puis il a fait des emplois alimentaires aussi.
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Il se rappelle son groupe de musique adolescent, "les virginies". Ils reprenaient des classiques du rock, les Rolling stones etc.
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Des conseils utiles?
Il ne se souvient pas, mais on a dû lui en donner.
Des conseils qui auraient été utiles?
Peut-être Brassens, car il a suivi un peu le même cheminement. Les choses doivent s'apprendre sur le tas. C'est un métier où on fait la quête du naturel. C'est comme cela qu'on arrive à convaincre et faire passer des messages.
Il faut rester soi-même pour réussir.
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La musique lui apporte un équilibre, il n'a aucun instant de répit avec la musique. Elle est tout le temps là. Il n'imagine pas un monde sans musique. Il écoute de tout, du jazz, du flamenco,...
Il y a des musiques bonnes partout. Une fois qu'on a fait le tri entre le mauvais et le bon c'est fabuleux.
La musique dirige tout dans sa vie, quand il rencontre quelqu'un complétement extérieur à la musique il est désemparé.
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Des expériences sur ses chansons du public?
C'est quelque chose qui arrive souvent. Des expériences vécues sur des chansons, ou des chansons qui racontent des expériences vécues.
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Le rôle de la musique en Europe est nul, il est lié au commerce. L'Espagne a su garder ses racines avec le flamenco. C'est l'histoire de l'Espagne que l'on sent vibrer. La France n'a pas gardé sa culture, et étouffé les langues locales. On a un rapport avec la musique assez ponctuel.
La musique rassemble et donne de la bonne humeur. Il est pour toutes les musiques, y compris les chansons à boire! Mais il trouve dommage que l'on ne chante plus nulle part.
La musique et la politique?
C'est un combat perdu d'avance, ils n'ont pas le temps de faire autre chose que d'assouvir leurs ambitions.
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Le chant en dehors du plaisir qu'il procure, il ne pense pas qu'il entraîne une transformation physique.
Pour chanter des chansons aux gens, il faut avoir de l'estime pour son voisin, un sentiment d'humanité universelle. Il faut aussi s'émouvoir soi-même avant de tenter quoi que ce soit.
C'est le sentiment de partage et de solidarité qui l'a poussé à s'engager en politique pour sa commune. Cela lui semble logique. C'est important même si confidentiel.
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Il parle de "La Corrida". Il pense qu'il donne une image plus sérieuse qu'il ne l'est vraiment, car on ne connait que ses chansons.
A la fin de la chanson, c'est Nicolas Reyes qui chante. Mais ils n’ont pas vraiment parlé de corrida.
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Ce nouvel album est teinté d'atmosphères pour TS.
Cabrel dit qu'il n'a plus de soucis de paraitre dans des colonnes de genre, que l'essentiel est dans la chanson. Si une chanson est bonne, ce n'est pas important de savoir de quel genre elle provient,
Il voit les choses avec des couleurs aussi quand il compose des chansons.
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Un parallèle entre le livre et le disque?
Oui car on feuillète, on lit un peu. Mais c'est plutôt une suite de petits courts métrages.
Il raconte que Gérard Jugnot lui a proposé de faire la musique d'un film. C'est sa seule expérience, mais cela ne l'intéresse pas spécialement, même s'il a trouvé que c'était rigolo de le faire. C'est trop spécial.
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Il va commencer une tournée, donc il va devoir se remettre à chanter et à jouer beaucoup plus pour se préparer.
Il travaille depuis longtemps avec les mêmes musiciens. Ils viennent d'horizons un peu disparates mais ils se retrouvent autour des chansons, et s'estiment beaucoup. Ils savent comment ils fonctionnent, c'est complice.
La notion de plaisir c'est le thermomètre numéro un!
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Il explique que c'est difficile de trouver une manière de parler de sujets déjà vus pour faire un nouvel album. Une fois que les idées et les phrases maitresses sont trouvées c'est assez facile. Mais le début est long. Il part toujours d'abord de la musique pour construire le texte.
Il y a beaucoup de nature dans ses chansons. Il aime beaucoup le rapport à la nature.
Il voit des choses alarmantes concernant la nature, des gens qui la détruisent sans penser aux générations futures. L'homme est encore extrêmement naïf.
Mais il croit encore en l'homme.
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TS le compare à un conteur de l'époque.
Cabrel trouve que c'est juste, il aime bien qu'il y ait des histoires dans ses chansons, et que ce soit raconté de manière originale.
Cabrel dit qu'il est rêveur. Quand il chante ses chansons, si les conditions sont bonnes, il rêve en chantant comme en écoutant de la musique.
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Il est timide, il préfère regarder par-dessus le public.
Il parle de guitare. Il aime une bonne guitare acoustique, et la faire vibrer. Il a moins de technique pour l'électrique.
Il y a beaucoup de travail pour avoir une bonne technique avec une guitare. Il passe 1h30 à 2h par jour avec sa guitare. Si c'est trop difficile il la fait jouer par quelqu'un d'autre. Il faut un équilibre total.
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Il parle de Dieu. Parler de Dieu c'est parler surtout des hommes. Il pense que chacun possède une part de bonté qui représente Dieu. Il ne croit pas vraiment, mais il croit en une petite étincelle qu'ont tous les hommes et dont nous devons prendre soin pour qu'elle se diffuse. C'est l'amour, l'humanité, la tolérance, savoir écouter et entendre.
Il parle du show business. Il y a des gens qui font du show et d'autres du business. Même si c'est opposé ils sont obligés de vivre ensemble.
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Des gens de confiance pour la musique?
Il fait écouter à des amis qui ne sont pas dans la musique. Cela lui donne une idée de ce qu'il doit faire. Soit il est rassuré, soit pas, mais ce sont des gens francs. Il faut accepter toutes les critiques, bonnes comme mauvaises. C'est un métier très exposé, le risque que cela comporte c'est d'être déçu par le jugement des autres.
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TS parle de l'évolution de la perception des chanteurs français.
Cabrel parle des chanteurs de variété, presque jetables, durant une époque. C'était volontaire à l'époque. Aujourd'hui les gens sont plus musiciens, et plus préoccupés. Ils vivent aussi plus normalement.
Une question de choix?
Cabrel n'aurait pas supporté de vivre autrement. Il fait un métier trop médiatisé mais il ne pourrait pas le vivre autrement.
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La réaction une fois le disque fini en main?
Cabrel explique que c'est un jour très spécial, vu la somme de travail que cela représente. C'est Noël! Mais il n'écoute plus, il a trop passé de temps dessus. Il le réécoutera une fois dans quelques mois.
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Cabrel fait aussi beaucoup de sport, du tennis. Et un petit peu de photo. Mais avoir une passion à ce niveau-là ne laisse pas de place pour d'autres passions.
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3 vœux: que ses enfants soient toujours en bonne santé, que le monde devienne plus intelligent et que les gens s'acceptent, et que tous les enfants du mondes soient aussi heureux que les siens.